UE : en attendant la présidence françaiseLa France succède à la Slovénie à la présidence de l'Union européenne le 1er juillet pour une période de six mois.Une présidence qui ne s’annonce pas d’ores et déjà comme une sinécure, avec avant même le passage de relais, la question du Traité institutionnel européen simplifié, dont la ratification dépend du référendum irlandais à ce sujet, l’Irlande étant le seul pays de l’UE à soumettre le texte au scrutin populaire.
Nicolas Sarkozy a de son côté multiplié les contacts avec les membres de l’UE pour préparer sa gouverne, dont le principal objectif est justement la mise en oeuvre de ce traité de Lisbonne, dont il est à l’origine.
L'axe Paris-Berlin
Après avoir tourné la page des « malentendus » avec l’Autriche sur les questions européennes en mai, puis une visite remarqué en Grèce, Nicolas Sarkozy a réaffirmé l’importance de l’axe Paris-Berlin lors de son déplacement en Bavière le 9 juin pour un sommet franco-allemand avec la chancelière Angela Merkel à propos des questions du climat, de l’énergie et de la défense en Europe.La question du traité de Lisbonne n’a d’ailleurs pas manqué de s’inviter à ce sommet de Straubing.
Lors d’une conférence de presse, la chancelière allemande et le chef de l’Etat français ont souligné leur accord sur une réaction commune au résultat du référendum irlandais, quel qu’il soit. Ainsi Angela Merkel déclarait-elle : « vous pouvez prévoir qu'il y aura une réaction franco-allemande commune, quelle que soit l'issue du scrutin ». A Nicolas Sarkozy de confirmer : "C'est aux Irlandais d'en décider. Mais ce que nous avons décidé avec Mme Merkel c'est que, quoi qu'ils se passe, la réaction sera franco-allemande", a-t-il confirmé. "Et quel que soit le choix des Irlandais, il y aura une initiative franco-allemande", a-t-il ajouté.Une position commune qui affirme la solidité du couple franco-allemand qui battait sérieusement de l’aile ces derniers temps.
Ainsi Le Monde daté du 8-9 juin, à la veille du sommet bavarois, faisait des variations sur le thème «
je t’aime, moi non plus » : «
malgré les efforts répétés des deux côtés, le courant ne passe pas », «
Faute de s’aimer, ils se parlent franchement », ou encore, «
L’Allemagne n’arrive pas à cerner son homologue français ».L’entente cordiale est toutefois de rigueur et Angela Merkel déclarait au journal local bavarois Strauinger Tagblatt à la veille du sommet bilatéral : «
L’Allemagne va soutenir de toutes ses forces la présidence française de l’UE, comme Nicolas Sarkozy a soutenu notre présidence ».
Les objectifs de la présidence françaiseLors de son déplacement à Athènes le 6 juin, Nicolas Sarkozy a énuméré devant les parlementaires grecs les priorités de la présidence française de l’UE : « la lutte contre le changement climatique, l'énergie, l'immigration, la défense et la sécurité, l'agriculture".Nicolas Sarkozy a particulièrement insisté devant les députés grecs sur "le pacte européen sur l'asile et l'immigration" qu'il proposera aux 26 autres membres de l'UE. Il a ainsi assuré à Athènes, confronté à un afflux massif d'immigrés en route vers l'Europe de l'ouest, que ce problème était aussi "le problème de la France". Il s'est dit partisan d'un système de garde-frontières européens, vieille revendication grecque, voire d'un système "de navires de garde-côtes communs entre les Français et les Grecs".
Si les points d’accord entre la France et ses partenaires européens sont mis en avant, le bât blesse sur le chapitre fiscal. Ainsi, lors d’une rencontre à Vienne entre la ministre française de l’Economie, Christine Lagarde et le vice-chancelier autrichien Wilhelm Molterer, elle déclarait que « Sur le dossier TVA nous ne voyons pas à ce stade de marge de manoeuvre pour un accord ».
Les questions de fiscalité doivent être décidées à l'unanimité des 27 Etats membres de l'Union européenne. « Mais il ne faudrait pas que sous prétexte d'unanimité on ne discute pas » sur ce sujet au sein du conseil des ministres de l'Economie et des Finances de l'UE, a ajouté Christine Lagarde.
La Commission européenne a promis de faire d'ici juillet une proposition sur les taux réduits de TVA qui divergent encore selon les Etats membres.Autre sujet fiscal, celui de la TVA sur les carburants. Nicolas Sarkozy avait proposé aux ministres des finances de la zone euro de plafonner la TVA sur les carburants, afin de limiter les effets de la hausse du cours du brut. Proposition rejetée, le premier ministre François Fillon précisant que si certains partenaires sont « réservés », d’autres sont plutôt ouverts » à cette idée.
La question sera remise à l’ordre du jour du prochain Conseil européen, qui rassemble les chefs d’Etat et de gouvernement des 27 Etats membres, des 19 et 20 juin, à une dizaine de jours de la présidence française.
La question du déficit français
Autre pomme de discorde, le déficit budgétaire français. Alors que Paris s’apprête à prendre la gouverne européenne, la France accuse un déficit budgétaire record qui la désigne comme l’un des plus mauvais élèves des 27, avec l’Italie.Ainsi, fin mai, la Commission européenne rappelait à l’ordre Parissur la question budgétaire en invitant Paris à redoubler d’efforts pour réduire son déficit qui, selon Bruxelles, frise dangereusement la limite autorisée de 3% du PIB (produit intérieur brut).
En avril 2007, les ministres des Finances de l’UE s’étaient engagés a effacer leurs déficits publics en 2010 au plus tard. Mais arrivé au pouvoir le mois suivant, Nicolas Sarkozy obtenait de facto un délai supplémentaire de deux ans, courant jusqu’en 2012, pour la France arguant d’une croissance moins soutenue qu’escomptée.Paris s’était d’autre part fait tapé sur les doigt en août 2007, lors du fameux « paquet fiscal » octroyé par Bercy d’un montant de 15 milliards d’euros, pointant un manque à gagner des finances publics devant faire face à un déficit abyssal.Le président de l’Eurogroup, Jean-Claude Junker est de son côté revenu à la charge début juin, insistant sur le devoir « absolu » des pays de la zone euro de présenter des budgets équilibrés en 2012 visant implicitement la France, par ce rappel à l’ordre.
Depuis, une bataille de chiffre oppose Paris à Bruxelles, Nicolas Sarkozy ayant suggéré à la Commission européenne de réviser ses estimations sur le déficit français, à la suite de bons chiffres de croissance en 2007 et au premier trimestre 2008. « Si l’Insee a revu ses chiffres à la hausse, peut-être que Bruxelles peut aussi s’interroger sur ses chiffres, mais je ne veux pas polémiqué », avait déclaré le chef de l’Etat le 16 juin. « Cela fait 35 ans que la rance présente un budget en déficit, comment voulez-vous qu’en douze mois nous puissions rétablir la totalité des déficits » s’interrogeait le président français.
Coût de la vie et coûts de la main d'oeuvreLa présidence française de l’UE arrive également au moment critique d’une explosion des prix de l’alimentaire. Une crise non pas européenne, mais mondiale.Du lait au pain en passant par l'huile, l'augmentation des prix alimentaires en Europe a atteint au printemps un niveau record. Les denrées alimentaires coûtaient en avril dans l'UE en moyenne 7,1% de plus qu'un an plus tôt, et en mars 7,2%, d'après l'office européen des
statistiques Eurostat. Un taux inédit depuis le début de la collecte de ces données en 1996, et bien davantage que l'inflation globale, qui était de 3,6% en avril et de 3,8% en mars.Les augmentations sont pour certaines très sensibles : les produits laitiers et céréaliers pèsent ainsi, avec la viande, 60% des dépenses alimentaires des ménages. Certains consommateurs européens commencent ainsi à avoir du mal à remplir leur panier, confrontés par exemple à une augmentation de 38,4% du pain et des céréales en Bulgarie, ou de plus de 30% du lait, du fromage et des oeufs en Estonie, en Lettonie ou en Slovénie.En France, moins durement touchée, la hausse atteint quand même 11,1% pour les produits laitiers, 10,3% pour les matières grasses, 6,6% pour le pain et les céréales.La commissaire à l'Agriculture Mariann Fischer Boel voit dans les projets en cours de réforme de la politique agricole commune (PAC) européenne la meilleure réponse à la crise. Elle veut supprimer certaines restrictions à la production comme les quotas laitiers ou la jachère.Cette crise s’accompagne d’une très grande diversité des salaires entre les 27 Etats membres.
Exprimés en euros, le coût horaire moyen de la main-d'oeuvre dans les 27 pays de l'Union européenne atteignait 20,35 euros, selon l'Office européen des statistiques, Eurostat. Cette étude a été réalisée sur la base des chiffres de l'année 2006, derniers disponibles pour la majorité des pays des pays.Tandis que la Suède arrive en tête avec 32,16 euros, devant le Danemark (31,98 euros), le Luxembourg (31,98 euros également) et la Belgique (31,58 euros), quatre pays entrés dans l'UE lors des élargissement à l'Est depuis 2004 ferment la marche: la Bulgarie (1,65 euro), la Roumanie (2,68 euros), la Lettonie (3,41 euros) et la Lituanie (4,21 euros).
La France affiche un coût horaire de 30,31 euros et le Royaume-Uni de 24,47 euros.